Galerie d’estampes du roi Stanisław August

Les débuts de la collection royale d’estampes datent de l’année 1748, quand lors de son séjour à Bruxelles, le jeune Poniatowski achète sa première estampe. C’est le moment où commence la fascination du roi des œuvres de Rubens et de Van Dyck, donnant naissance à sa passion de collectionneur.

En tant que roi, il ne se limitait guère à la collection de peintures, de dessins et d’estampes. À l’exemple des autres souverains, dont les résidences et les collections il eut l’occasion d’admirer pendant ses voyages de jeunesse en Europe, son activité de collectionneur recouvre tous les domaines de l’art et de la science. Avec la même ardeur, il ajoute à ses collections des sculptures, des médailles, des pièces numismatiques et « des antiquités », ainsi que des cartes, des modèles de machines, des instruments physiques et astronomiques et des pierres précieuses. Une place particulière dans les collections royales est réservée au Cabinet d’estampes, qui devient la plus intime de ses collections, l’objet de fierté et aussi un lieu de retraite dans les moments difficiles de son règne.

L’arrangement des dessins artistiques, d’architecture et des estampes, amassés pendant des années, est dicté par la fonction utilitaire que le créateur de la collection leur a attribuée. Selon l’idée de Stanisław August, la collection est censée de former une base de connaissances sur l’art européen, en commençant du XVIe siècle jusqu’à l’époque du roi. Elle est cependant envisagée comme une collection privée servant de source d’inspiration, un matériel de comparaison et d’études pour les artistes et les architectes employés à la cour, ainsi que pour les étudiants de la future Académie des Beaux-Arts. Vers la fin de la vie de Stanisław August, sa collection d’estampes et de dessins compte, selon des différentes sources, entre 80 mille et 100 mille objets libres, en dossiers ou en volumes.

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Catégories thématiques des classes

La plus nombreuse des neuf catégories distinctes du Cabinet d’estampes est la Classe de Portraits comptant plus de 6600 estampes tenues dans 51 dossiers. Elle contient des portraits de figures historiques remarquables, y inclus des papes, des prêtres, des empereurs, des rois, des princes, des ministres et hommes militaires ainsi que des savants, des écrivains et des artistes. La collection fut complétée par deux boites distinctes, de format un peu différent, intitulées Polonorum Icones, dont le contenu est constitué de dessins et d’estampes (dans la plupart des cas) représentant des souverains et des personnages historiques polonais.

Les estampes aux thèmes historiques, aménagées dans 57 dossiers appelés Classe de Histoire, forment un autre groupe important de la collection. Il comprend principalement des œuvres portant sur la thématique religieuse, dont la plupart comporte des scènes de l’Ancien Testament et des images des saints. La thématique profane est représentée par l’histoire de la Grèce antique et de Rome, tandis que les œuvres concernant l’histoire moderne forment 22 volumes illustrés du Cabinet du Roi, inclus dans cette classe, qui glorifiait le règne de Louis XIV — ses victoires militaires, cérémonies, résidences et collections. Arrangée dans 31 dossiers royaux, la Classe de la Fable contenait des scènes mythologiques, des images de dieux et d’héros, ainsi que des allégories et illustrations des textes littéraires de type divers. Les estampes de thèmes génériques (divertissements, festins, fêtes galantes, etc.) et les caricatures sont tenues dans 17 dossiers de la Classe de sujets de Fantasie, dont les trois derniers contiennent des estampes et des dessins dédiés aux cérémonies de la cour (tournois, arrivées officielles et illuminations) et à l’architecture occasionnelle leur accompagnant (portails, arcs, fontaines, obélisques, etc.).

À part une immense collection d’estampes, Stanisław August a amassé une plus petite collection de dessins artistiques comptant seulement deux milles pièces. Des dessins particuliers sont ajoutés à la collection par décision du roi, pour qui le critère principal, à côté de l’aspect esthétique, est le nom de l’auteur. Stanisław August porte un intérêt particulier à l’architecture, ce qui s’exprime entre autres par le nombre d’estampes, de dessins et de volumes appartenant à cette catégorie. Dans cette partie de la collection, la plus importante place est occupée par l’ensemble des dessins d’architecture et décoratifs liés étroitement au mécénat de Stanisław August. Aujourd’hui, cet ensemble constitue un matériel d’étude inestimable sur l’histoire de l’architecture et d’urbanisme de l’époque des Lumières et de l’œuvre de Jakub Fontana, Domenico Merlini, Jan Chrystian Kamsetzer, Efraim Schröger ou Jakub Kubicki, par exemple.

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Le sort du Cabinet royal d’estampes

Après la chute de l’Insurrection de Kościuszko, la tsarine Catherine II de Russie a contraint Stanisław August de quitter Varsovie. À la suite du troisième partage de la Pologne et l’abdication du roi, Poniatowski, isolé à Grodno, s’est vu obligé de rembourser ses dettes énormes, qu’il contracta pendant son règne. Afin de satisfaire les demandes de ses créanciers et peut-être également dans le but d’obtenir des fonds pour son voyage en Italie, qui lui fut suggéré par la tsarine, Stanisław August décide de vendre le Cabinet d’estampes au roi Frédéric-Guillaume II de Prusse. Les négociations durent jusqu’au 1797 mais se soldent par échec.

Finalement, en 1832 en résultat des répressions du tsar après la chute de l’Insurrection de Novembre, les collections universitaires, y inclus le Cabinet d’estampes, comme d’autres collections polonaises sont confisquées et transférées à l’Académie impériale des beaux-arts de Saint-Pétersbourg. Elles y restent jusqu’au 1923 avant d’être restituées à l’Université de Varsovie à la suite du Traité de Riga.

La collection d’estampes a subi des pertes énormes en résultat de la Seconde Guerre mondiale. Sur les 163 dossiers ornementaux de la collection royale, seulement 67 ont survécu, dans une forme souvent incomplète. Sur les 4300 dessins, seulement 2357 sont restés et sur les 596 volumes royaux, seulement 290 ont survécu la guerre. En outre, la destruction des catalogues, des inventaires et de l’archive photographique a rendu considérablement plus difficile l’évaluation complète des pertes.

Przemysław Wątroba
Cabinet d’estampes de la Bibliothèque de l’Université de Varsovie

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